La Fille de L’Homme en Blanc…

Avez-vous déjà vu mourir votre père?

Je ne parle pas du concept psycho freudien de tuer le père à la façon d’œdipe, de fantasme inavoué, de cauchemar ou prémonition… loin de là, loin de moi (vade retro satanas 🤞😆)… Non.

Je parle de voir quelqu’un dont les poumons étaient désormais défaillants, qui manquait de souffle… inspirer et expirer, inspirer profondément puis expirer pour la dernière fois… en le regardant en face et lui dire Au-revoir. Vous, non? (Dites le nous en commentaire 👀), Moi Oui.

Cette scène s’est déroulé il y’a 19 mois. Peu avant cela, j’avais décidé de prendre un congé sabbatique d’un an (comme pour dire que je savais déjà que ce moment arrivait). Un congé d’écriture car je croyais qu’il ne s’agirait que de cela, de ne pas se livrer, de prendre du temps, se préserver pour vivre pleinement cette transition. Plus d’un an et demi après, 1 mois exactement après ce qui aurait du être le 60 tième anniversaire du 1er homme de ma vie, je sais désormais qu’il s’est agit de bien plus… D’un cheminement vers soi. Il m’a fallu plus d’un an pour recommencer mettre des mots décousus sur ces moments de vie (car la mort fait partie de la vie..CQFD). Et j’ai compris une fois de plus, parmi tant d’autres choses, qu’il y’a effectivement un temps pour tout mais personne ne peut en connaitre d’avance la durée. Mon deuil a commencé et au final n’a pas duré un an, surement ne finira t’il jamais dans le fond.

1863867-Niccol-Machiavelli-Quote-The-more-sand-has-escaped-from-the

« Plus le sable de notre vie s’est échappé du sablier, plus nous devrions voir clair au travers. »
Ces mots sont souvent attribués à Niccolò Machiavelli ou à Jean-Paul Sartre               (Grand écart de ça 🤣)

« Je souhaites être vêtu de blanc uniquement… ma tombe à l’endroit X, orientée Y », Mon Père!!! Il avait parlé à chacun de ses 2 enfants, à son tour et à sa façon. Personnellement je ne faisais qu’écouter, demander des précisions et ma seule réponse était: « OK Papa. Mais tu sais, On sait déjà. » Il avait bien fait son boulot mon petit papa au point qu’à quelques détails près il n’avait plus besoin de dire les choses. C’est une grâce de vivre et c’est une plus grande grâce de récolter ce que l’on sème patiemment…La récolte n’est pas toujours sonnante et trébuchante. Il y’a bien plus précieux. La Mort est l’ultime initiation pour ceux qui partent mais surtout pour ceux qui restent. Ce moment se prépare pour nous, comme pour ceux que nous laisseront, dès le jour de notre naissance et dès la leur. Le chemin est long, mais idéalement nous mène à ce moment ultime, inévitable, plus ou moins bien préparé.

Alors le moment venu tout fut fait, sans oublier d’y mettre notre grain de sel pour aromatiser tout ça… l’homme fut vêtu de blanc, le caisson de la même couleur surligné d’or, les bougies, les fleurs… etc. Et plus tard le Caveau. Le Blanc a été le fil conducteur. Notre source de lumière dans l’obscurité. Nous a rappelé à quel point la mort c’est aussi la vie. A permis de garder le soleil au zénith le jour où nous mettions en terre l’un de nos deux guides. Le Blanc prenait la place refoulant la peine, la peur, les questions très souvent tapies dans l’ombre.

Je pourrais essayer tant bien que mal de dire ici tout ce que la vie et les actes de ce Monsieur ont apporté au monde en tant qu’Ame consciente de sa nature, mais on sera ici jusqu’à l’An 40 (2040 hein) que je n’y arriverais surement pas. Je commence à peine à percevoir la globalité de l’être qui m’a servi de père, à mesurer combien sa complexité que je croyais connaitre m’était encore bien mystérieuse. On connait très peu nos parents, surtout africains, en dehors de leurs rôles. Les hommes et femmes derrière la posture sont souvent hors de porté ou ne voient le jour à nos yeux que lors d’événements tragiquement ou symboliquement révélateurs. Puis vient le moment où l’on doit accepter de marcher sur la terre où repose notre père et subtilement quoi que l’on dise, peu importe notre cheminement jusqu’à ce jour là: On grandit.

Il ne s’agit plus, physiquement et plus encore spirituellement, d’être l’Enfant DE; il s’agit d’ETRE. Peu importe son age ou son parcours, la pleine mesure d’être adulte nous frappe de plein fouet; patriarche aussi désormais d’une certaine façon (dans le sens symbolique que le continent mère donne à ce terme); responsable de notre destin sans parapluie ni béquilles ni personne qui mettra encore les genoux à terre pour nous (les orphelins des 2 parents comprennent); l’heure de mettre en œuvre ce qui a été emmagasiné de savoirs et d’apprentissages arrive; le moment critique de s’affranchir du poids du parent dans nos choix sans renier le bagage reçu (Tuer le père toujours plus). On ne se contente plus de vieillir, On mûrit.

On dit communément que l’on perd les gens. Ai-je perdu mon père? Je n’ai jamais eu cette sensation, ce ressenti. Peut être est ce l’éducation spirituelle qui nous a imprégné toute notre vie qui nous y emmène plus facilement. J’ai été peinée et le serai toute ma vie; j’ai peur et surement aurais-je peur toute ma vie désormais. Je n’ai plus son corps auquel m’accrocher, son bras pour me soutenir lorsque je me relève, ses mains qui conduisent la voiture à ma place parce-que je ne veux pas et me mènent ou je souhaite (de temps en temps hein..il n’est pas votre chauffeur, battez-vous ou apprenez à conduire madame! 🤣🤣), je n’ai plus sa bise sur le front lors des événements importants de ma vie, je n’ai plus sa voix qui m’explique tout ce que je veux comprendre des traditions-us-coutumes-mysticisme-histoire familiale passée et contemporaine. Mais non, je n’ai pas perdu mon père. Il continue sa vie, son chemin. Mieux, je n’ai pas perdu son amour pour moi.

243596

Je ne raconterai pas toutes les expériences vécues par chacun comme par lui durant ses 7 mois de maladie, ni ne ferai part des rêves des uns avant son départ, ni des conversations des autres avec lui à des milliers kilomètres le jour de sa mort alors que pour la première fois son corps avait cédé, ne raconterais pas les ‘miracles’ pendant ses obsèques et même après. Je dirais juste que chacun devrait avoir la grâce de voir célébrer sa vie plus que pleurer sa mort et il ne tient qu’à nous.

Parfait? noonnn non, il me fatiguait à m’envoyer en cuisine net quand je voulais fuir dans ma chambre… j’entends encore sa voix dans ma tete (« Ah mamyyyy, bidjeck bi tabéé?!!! Etre ‘la mère’ de son père quelle plaie 😜😜), il ne buvait pas d’alcool (une petite Guiness en 3 jours une fois l’an c’est un crime pour l’économie mondiale norh?🤦‍♀️ Ntap), ne fumait pas et tant mieux (tout ça la pour mourir parce-que les poumons lâchent et manquer de souffle, quand je vous dis que le type là était lui fort), aimait les foto depuis petit peut-être pour immortaliser mieux que sa mère partie trop tôt son passage (me voici qui comme mon aïeule homonyme, très belle brune de son état autant que je suis noire, n’aime pas les foto mais je me soigne), et j’en passe et des meilleures. Chaque jour qui passe je suis de plus en plus MOI et embrasse de mieux en mieux d’être la fille DE. Connaitre d’ou l’on vient est précieux; profitez pleinement de ceux qui sont encore debout et qui en savent un rayon, posez leurs les questions, découvrez vos familles, votre pays, votre histoire; viendra bien tôt le moment ou vous en serez dépositaire pour les générations à venir.

Chaque jour qui passe, je réalise pleinement l’importance des valeurs qu’il se peinait à nous inculquer. A partir de rien.. de rien du tout, on peut être grand… grand d’humanité, et n’emporter que ce que l’on a véritablement donné au monde, aux autres.

En 3 mots, il nous a appris que: La vie continue.

Sur les épaules d’un petit bout d’homme à l’esprit géant je me suis longtemps tenue, j’y ai pu voir la vie au-delà des limites de l’horizon, ce fut ma grâce. Il est temps de trouver soi-même le chemin qui y mène.

🎁 A l’Homme en Blanc qui nous regarde, Merci. Ta fille qui t’aime.

nomad-e1449152311273

Une réponse sur “La Fille de L’Homme en Blanc…”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *